PRIERE.
Je viens vers vous, Seigneur,
Sans hâte et sans frayeur;
Vous seul avez fixé (ou fixerez) le terme
Du chemin imparti à l'humble serviteur
Qui ose vous parler
De ses craintes,
Sa vie
Ose vous demander:
« Après ? ...
Tout est fini? »
Je ne suis pas de ceux qui,
Dimanche après dimanche,
Viennent vous consommer
Sous forme d ’hostie blanche
Après avoir serré la main de leurs voisins
Qu ’ ils ne connaîtront plus
Dehors.
Je ne suis pas de ceux qui vous accablent de mots:
« Pardonnez-moi...
Accordez-moi ...
Protégez-moi ...
Aimez-moi ...
Oubliez-moi... »
Je ne suis pas non plus du petit nombre d ’eux
Qui tout ont quitté pour vous,
Ni d ’eux qui humblement
à vêpres, à laudes,
A mâtines vous louent.
Je ne vous parle pas;
Parfois j ’admire
Votre oeuvre de géant
En l ’oiseau, en l’enfant,
En voyant un ciel pur,
En contemplant la mer,
( Si cruelle fut-elle au marin que je fus,
Si cruelle soit-elle ...).
Mais surtout, au tréfonds de la boue de son âme,
J ’ose vous dire, oh Dieu !
Que je vous reconnais
En l ’homme, en mon prochain, en moi-même parfois
Comme un diamant caché,
Une opale,
La flamme
L ’esprit
De vie.
Ainsi je me présente à vous;
Vous répondrez un jour à ma question muette
Vous savez qui je suis
Jugez-moi, pardonnez.
Jean-Louis Charvet, 2005.