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25 juin 2013 2 25 /06 /juin /2013 05:58

Esclaves et boucaniers à Saint Domingue.

Le texte qui suit (orthographe et ponctuation de l’époque respectées)  est tiré de l’Abrégé de Histoire générale des voyages, tome XV, publié à Paris en 1780. Il reprend ce que dit le Père Labat, lors de son voyage, au début du XVIII° siècle, à Saint Domingue, alors en partie française.

« Le P. Labat compte treize lieues de l’Estere au Cul-de-sac, & se plaint des chemins, qu’il trouva fort incommodes, mais qu’il était aisé, dit-il, de rendre moins difficiles. A l’occasion des Nègres Marrons, ou fugitifs, qui s’étaient réfugiés au nombre de six à sept cens, dans un canton de l’isle, nommé la Montagne noire, il nous apprend que l’usage de cette Colonie, est de marquer les Nègres, lorsqu’on les achete. On se sert, pour cette opération, d’une lame d’argent très-mince, qui forme leur chiffre. Elle est soutenue par un petit manche : & comme le chiffre, ou les lettres, pourraient se trouver les mêmes dans plusieurs habitations, on observe d’appliquer la lame en divers endroits du corps, ce qui s’appelle étamper un Nègre. Il suffit de chauffer l’étampe, sans la faire rougir. On frotte l’endroit où elle doit être appliquée, avec un peu de suif ou de graisse, & l’on met dessus un papier huilé ou ciré, sur lequel l’étampe s’applique le plus légerement qu’il est possible. La chair s’enfle aussi-tôt ; &, dès que l’effet de la brûlure est passé, la marque reste imprimée sur la peau, sans qu’il soit jamais possible de l’effacer. Un esclave, qui est vendu & revendu plusieurs fois, se trouve aussi chargé de ces caracteres, qu’un ancien obélisque d’Egypte. On n’a point cette méthode dans les petites Isles ; et les Nègres y seraient au désespoir de se voir marqués comme les chevaux & les bœufs. Mais on a jugé cette précaution absolument nécessaire, dans une Isle aussi vaste que Saint-Domingue, où les  Nègres peuvent fuir, & se retirer dans des montagnes inaccessibles. C’était le cas où la Colonie se trouvait alors. On proposa d’assembler des Volontaires, pour enlever ceux qui avaient pris la fuite ; personne ne se présenta, pour une expédition qui ne promettait que de la fatigue & du danger. Il n’y avait que les chasseurs, c’est-à-dire les Boucaniers, qui fussent capables de l’entreprendre, parce qu’ils connaissaient tous les détours des montagnes, & qu’ils étaient faits aux plus rudes marches ; mais, loin de souhaiter la réduction des Nègres, ils trouvaient de l’avantage à tirer d’eux des chevaux sauvages, des cuirs, & des viandes toutes boucanées, pour de la poudre, des balles, des armes, des toiles & d’autres secours, qu’ils leur donnaient en échange. Cependant, comme ce trafic ne pouvait être secret, & qu’on en murmurait hautement, ils offrirent, pour l’honneur de leur fidélité, de marcher à la manière des Flibustiers, c’est-à-dire, à condition que ceux qui reviendraient estropiés, auraient six cens écus, ou six Nègres, que les Nègres qui seraient pris, leur appartiendraient, & que pour la sûreté des estropiés, toute la Colonie s’obligerait solidairement. Ces conditions furent rejettées, parce que le profit n’aurait été que pour les chasseurs. En général, le maître d’un Nègre fugitif est obligé de payer vingt-cinq écus à celui qui le prend hors des quartiers Français, & cinq écus seulement pour ceux qu’on prend dans les quartiers, mais hors de leur habitation. »

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