" En parcourant Alger, on ne peut se refuser à lui reconnaître le titre de jolie ville. Ses quais magnifiques sont bordés d'immenses magasins. Des voies ferrées s'y croisent dans tous les sens, facilitant le transport des marchandises débarquées sans cesse des nombreux vapeurs qui font le service d'Alger à Marseille et en Italie. Ces vastes comptoirs sont réunis à la ville par de larges rampes pratiquées en maints endroits sur toute la longueur du quai. Ces rampes aboutissent toutes au boulevard de la République, très agréable promenade, véritable boulevard extérieur, d'où l'on peut admirer le splendide panorama de toute la baie, depuis les verts coteaux de Mustapha jusqu'au cap Matifou.
Alger possède plusieurs places, dont la plus belle est celle du Gouvernement, ouverte au nord sur la mer, bordée sur les autres côtés de rues commerçantes et populeuses et plantée sur tout son pourtour de palmiers, malheureusement trop desséchés sur ce sol mélangé de pierre et de bitume. Au centre se dresse la statue du duc d'Orléans, le pacificateur de l'Algérie, statue faite du bronze des canons pris à Alger même. A l'un des coins de la place s'élève la fameuse mosquée Djaman-Djedid, en forme de croix. On prétend que l'architecte génois qui fut forcé de la bâtir pour les musulmans, dont il était devenu l'esclave, la construisit ainsi par ironie, et que, pour le punir de cette insulte faite à la religion de Mahomet, les Arabes le brûlèrent vif.
Les rues d'Alger sont larges et bien percées. Les principales portent les noms de Bab-Azoun, de Bab-el-Oued, de la Marine et de Chartres. Cette dernière surtout est très commerçante, et l'on y voit constamment circuler sous les arcades les costumes les plus disparates, l'élégant habit à boutons d'or d'un dandy parisien, la sordide lévite du juif, le burnous blanc du Kabyle, le voile soyeux de la Mauresque aux yeux agrandis par le koheul, à la face jaunie par le henné.
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Un aspirant de marine."
Journal des voyages, 28 février 1886.
