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31 mai 2013 5 31 /05 /mai /2013 23:36

Article tiré du Journal des voyages du 28 décembre 1902. La scène se passe à Tolosa.

" Les sports en Espagne. Un combat de béliers.

Midi sonne, la lice s'ouvre et l'on voit apparaître deux bêtes horribles qui, d'abord, semblent surprises, hésitent, n'ont pas l'air de savoir ce que l'on attend d'elles. Mais cet effarement ne dure qu'un instant, et, bientôt, les béliers se précipitent l'un sur l'autre avec des coups de tête d'une violence extrême. Frémissements, cris dans la foule, qui a pris parti entre le représentant de Tolosa et son adversaire, car ce ne sont pas seulement deux bêtes qui luttent, ce sont deux localités. Mais, hélas! avant même qu'on ait eu le temps de se rendre compte du caractère de cette lutte et de la tactique des animaux qu'elle met aux prises, tout est fini. L'un des deux béliers a donné de si furieux coups de tête et labouré d'une telle estafilade le ventre de son antagoniste que celui-ci, dolent, découragé ou lâche, se rend à merci. Il n'y a plus qu'à panser la victime.

...

LECTOR."

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27 mai 2013 1 27 /05 /mai /2013 23:16

Extrait du Journal des voyages du 10 juin 1888.

" Les chiens de Constantinople.

... Le musulman, ni cruel, ni dur, protège et nourrit les animaux qui se fient à sa bonté. Les chiens ne souffrent pas de la faim, grâce aux débris des boucheries, aux reliefs des maisons particulières, aux rebuts de la cuisine des vaisseaux ancrés au port. Les sectateurs de l'Islam leur distribuent le vendredi du pain et de la viande, à la mosquée de Bajazet; mais le chien de Péra a l'instinct de l'indépendance; il préfère rôder toute la nuit et fouiller dans les ordures, accomplissant ainsi un travail de salubrité publique. Après un repas frugal, il se rend aux conciliabules que tiennent chaque soir les représentants de la race canine, tantôt hurlant furieusement, tantôt processionnant silencieusement, parcourant lentement ou ventre à terre la ville et les faubourgs.

... L'étranger qui débarque à Constantinople est péniblement affecté de voir que hommes et chiens n'ont aucun rapport, tout en vivant dans une paix parfaite. Le courage de ces animaux vagabonds ne paraît guère dépasser l'instinct de la défense, et ils font beaucoup plus de bruit que de besogne. Ils tolèrent l'étranger à la longue, après l'avoir d'abord mal accueilli. Constantinople est la seule ville d'Europe où on laisse vivre un chien sans maître et sans gite. Continueront-ils à vaguer dans la capitale turque et à empêcher même le sultan de dormir au fond de son palais? Que deviendront-ils le jour où les Osmanlis seront remplacés par une autre race? Questions intéressantes pour les pauvres animaux, peut-être discutées laborieusement dans les assemblées nocturnes de ces quadrupèdes, mais qu'un Européen serait bien téméraire de vouloir résoudre."

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8 mai 2013 3 08 /05 /mai /2013 19:57

Tiré de l'Illustration du 7 juillet 1866.

"... je ne vois rien de bien nouveau à Paris, rien qu'un jouet récent en vente partout. Il ne s'agit pas du Bismark qu'on fait sauter au bout d'un fil de caoutchouc, lui, qui, tout au contraire, tire ordinairement les ficelles; je veux parler de la cage à mouches. Une véritable cage à barreaux étroits, en fer blanc, une prison. Qu'en dites-vous? Moi, je trouve l'invention odieuse. C'est l'encouragement au meurtre. L'enfant, c'est reconnu, déteste l'animal, ou plutôt il l'aime à la façon des bêtes de proie, de l'aigle, par exemple, qui adore l'agneau. Cet âge est sans pitié, la chose est sûre. La nature tremble devant les enfants. Le chien, caressé par le vieillard, a les oreilles tirées par le gamin. L'oiseau, même apprivoisé, est plein de crainte. Entre l'enfant et le chat, il ne voit guère de différences. Pourquoi les fourmis s'obstinent-elles à bâtir, à creuser, à lutter? D'un coup de canne l'enfant met au néant la fourmilière, tant de merveilles, tant de peines! Je ne dis rien des hannetons, mais s'ils parlaient! Quant aux mouches, plus que les autres elles pâtissent. L'enfant les décime, les ampute, leur coupe en riant les ailes, les guillotine entre deux queues de cerises. Les savants prétendent que les mouches meurent quand vient l'hiver. Les savants se trompent. Et s'il n'est plus de mouches à la fin de l'automne, c'est que les vacances ont passé sur la race, et que les collégiens, tout en bâillant, ont organisé, pour se désennuyer, les massacres de septembre.

Or, ils se font complices de ces exécutions, les marchands qui vendent des cages à mouches et les parents qui les achètent. C'est la cruauté sanctionnée, la pitié brusquement confisquée, la torture devenant jouet, la prison érigée en récréation. Que si tous les parents veulent faire de leurs fils des procureurs généraux, la chose est parfaite. On n'oublie pas ces impressions premières. Songez que le premier jouet du Français est le tambour, comme celui du petit Anglais est un bateau, et que de là viennent peut-être cette humeur martiale de nos compatriotes et ce goût des choses maritimes chez nos voisins. Mais, - songez-y, - que serait une génération qu'on aurait habituée dès l'enfance à jouer avec un gibet?

JULES CLARETIE."

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29 avril 2013 1 29 /04 /avril /2013 15:22

Tiré de la revue La Famille du 26 décembre 1880, l'article qui suit:

" Le Paradis des Chiens.

Ce Paradis-là, c'est le Japon. Les Japonais ont, depuis bien longtemps, devancé la Société protectrice des animaux.

Au Japon, les animaux domestiques font, en quelque sorte, partie de la famille; dans ce pays, avant la suppression de la féodalité, suppression toute récente, et qui date de 1868, la loi prodiguait les tortures les plus invraisemblables aux criminels, tandis qu'un acte de brutalité envers un chien ou un chat a toujours été chose complètement inconnue.

Les habitants de l'empire du Soleil Levant ont toujours eu la plus grande déférence pour nos commensaux à quatre pattes. Ils ont leur place marquée au foyer domestique, on les traite avec politesse, et on se garde bien de dire brutalement inou ou neko (chien ou chat). On a soin de les appeler poliment inou-san, neko-san (monsieur le chien, monsieur le chat).

Un célèbre empereur du Japon est même allé plus loin: il était né sous le signe astrologique du chien et attribuait à ce hasard le succès et le bonheur qui avaient marqué toutes ses entreprises. Il ordonna que, dorénavant, les chiens morts ne fussent plus jetés à la voirie, mais bien enterrés respectueusement dans des cimetières spéciaux.

Un gentilhomme japonais avait perdu un de ses lévriers, et pestait contre l'idée saugrenue de son souverain, qui l'obligeait à faire transporter le corps de son chien à une grande distance de sa demeure.

"Tu as grand tort de te plaindre, lui dit un de ses amis auquel il contait ses doléances. Tu es obligé de déranger un de tes valets pour enterrer ton chien, c'est vrai, mais remercie le ciel de ce que notre souverain ne soit pas né sous le signe du cheval!"

La civilisation occidentale a aujourd'hui envahi le Japon, les soldats japonais sont armés de fusils se chargeant par la culasse, et ont laissé de côté leurs armures damasquinées, et leurs hallebardes bizarres, mais le culte des indigènes pour leurs animaux favoris n'a subi aucune altération, et de longtemps le code n'y punira les sévices envers les animaux domestiques."

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22 avril 2013 1 22 /04 /avril /2013 20:22

Les feux de la Saint-Jean : mauvais temps pour les chats.

 

Le 24 juin est fêté saint Jean-Baptiste, qui annonça la venue du Christ et le baptisa ; dans l’ancien temps, cette fête était accompagnée d’importantes réjouissances. Le texte ci-dessous, tiré de la revue La Mosaïque de 1837,  les décrit.

Jean-Louis Charvet.

 

«  Le feu de la Saint-Jean.

La joyeuse Saint-Jean, que fêtaient l'Italie, l'Espagne, la France, etc., se célébrait à Paris avec le plus grand appareil; l'usage voulait que les rois eux-mêmes y intervinssent, lorsqu'ils se trouvaient dans la capitale, pour y remplir les premiers rôles, pour y faire, en quelque sorte, l'office de grands prêtres du feu. Des témoignages authentiques constatent que, de Louis XI à Louis XIV, tous les princes qui occupèrent le trône s'acquittèrent de cette charge et mirent le feu au bûcher de la Saint-Jean, qu'on élevait sur la place de Grève ou de l'Hôtel-de-Ville. Il existe encore un curieux procès-verbal des formalités avec lesquelles il fut procédé à la célébration de la Saint-Jean à Paris, sous le règne du roi Charles IX, en l'année qui suivit la Saint-Barthélémy, en 1573.

On avait dressé sur la place de Grève un mât d'une soixantaine de pieds de hauteur, tout le long duquel étaient fixées plusieurs pièces de bois transversales. Ce mât s'élevait du centre de dix voies de bois disposées en bûcher et d'un vaste amas de paille, et les morceaux de bois mis en travers supportaient cinq cents bourrées et deux cents cotrets. Une quantité considérable de pièces d'artifice, telles que fusées, pétards, lances à feu et bombes, avait été, en outre, distribuée au milieu de tous ces combustibles, que décoraient des bouquets, des guirlandes et des couronnes. Mais le morceau capital de cet édifice destiné aux flammes, la pièce sur laquelle se portait de prédilection l'intérêt public, c'était un grand sac de toile attaché au sommet du mât, et dans lequel étaient renfermés vingt-quatre chats, condamnés à être brûlés vifs, pour la plus grande joie des spectateurs. Le privilège de fournir ces chats, dévoués annuellement au feu de la Saint-Jean, était, à cette époque, exercé par Lucas Pommereux, l'un des commissaires des quais de la ville, et lui rapportait, par an, trente et quelques sous parisis. Lucas Pommereux s'avisa, pour donner, est-il dit au rapport, plus grand plaisir à Sa Majesté, de joindre un renard vivant aux vingt-quatre victimes, et les Parisiens s'étaient fort réjouis de cette heureuse innovation. Aussi la foule était-elle si abondante et si tumultueuse que trois cents archers, arbaletriers et arquebusiers avaient fort à faire pour la contenir. Les magistrats de la ville, en costume d'apparat et portant chacun à la main une grosse torche de cire jaune, entouraient le bûcher, pendant que des orchestres, placés sur des estrades mêlaient des fanfares aux clameurs de la multitude et aux miaulemens des chats, qui criaient du fond de leur sac, comme s'ils eussent deviné leur sort. Enfin Charles IX arriva, environné de toute sa cour, et le prévôt des marchands s'avançant à sa rencontre, lui plaça entre les mains une torche faite de cire blanche et ornée d'une poignée de velours rouge. Le roi ayant mis le feu au bûcher, en un instant la flamme atteignit le sommet du mât, se répandit sur tous ses rameaux, et bientôt tout l'échafaudage s'écroula, en faisant jaillir dans les airs des milliers d'étincelles: chats et renard avaient vécu, non sans signaler leurs derniers momens par d'horribles hurlemens. Charles IX et les seigneurs et dames de la cour entrèrent alors dans l'hôtel-de-ville, où les attendait une collation, dont le narrateur a consigné minutieusement le menu. Il y avait, entre autres friandises, des dragées musquées, des confitures, des cornichons, quatre grandes tartes, des massepains, sur lesquels étaient figurées les armoiries royales, en sucre brûlé; des crèmes, des fruits et deux livres et demie de sucre en poudre. Pendant le festin royal, la foule parisienne, à laquelle la bride était alors lâchée, se précipita sur le bûcher encore fumant, pour en enlever les débris qui, portés en sachets ou suspendus au foyer domestique, devaient, d'après la croyance populaire, éloigner la foudre, prévenir les maladies contagieuses, combattre les sortilèges, et procurer aussi, dans l'année, de bons mariages aux jeunes filles.

Telle ou peu s'en faut se célébrait la Saint-Jean sous les prédécesseurs de Charles IX, et jusque sous Louis XI, qu'une ancienne gravure, dont la nôtre est imitée, représente en grand appareil à la cérémonie du feu, sur la place de Grève.

Cette bizarre cérémonie, sur laquelle le supplice des chats jette une teinte de barbarie, se soutint long-temps sans déchoir. Henri IV, Louis XIII, se soumirent encore à l'usage; Louis XIV lui-même alluma une fois le feu de la Saint-Jean, en 1648; mais il n'avait alors que dix ans, et l'on peut croire qu'il y eut de sa part plus de désir de s'amuser que de condescendance pour la coutume; dans la suite du moins il s'abstint de faire brûler des chats: la fête, dépouillée de la présence royale, perdit toute sa splendeur, dit un historien, et devint très-simple: les prévôts des marchands, les échevins et leur suite allaient, sans savoir pourquoi, mettre le feu à un amas de fagots et se retiraient après cet exploit. Aujourd'hui ceux qui voudraient rechercher encore à Paris des traces du feu de la Saint-Jean n'en pourraient plus retrouver le souvenir que dans quelques feus de paille, allumés par des enfans; mais dans les provinces, où les usages populaires résistent mieux à l'influence des temps, les feux de la Saint-Jean brillent encore annuellement de leur primitif éclat. Dans la Bretagne surtout, parmi ces populations sauvages à la longue et vivace mémoire, la fête de la Saint-Jean n'a rien perdu de ses joies et de ses solennités, et même dans quelques parties bien retirées du Morbihan et du Finistère, le clergé remplit encore le rôle que les rois remplissaient à Paris, et les paysans recueillent encore les cendres qui sont réputées porter bonheur. »

 

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11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 15:40

Au Chien galant.

Dans les années 1820, on pouvait voir déambuler dans les rues de Paris, plus spécialement dans celles du Quartier latin, un homme qui conduisait une charrette tractée par un chien Saint-Bernard. Vêtu de noir, à la figure maigre, Brutus Longepierre avait été, pendant plus de vingt ans, soldat des armées de la République et de l’Empire. Il était désormais un « demi-solde », et était contraint de travailler, pour vivre dignement. Dans la petite maison de la rue Monge, qui constituait son seul héritage, avait longtemps vécu un pauvre hère qui gagnait sa vie en chantant des complaintes, en s’accompagnant d’un orgue de Barbarie ; le Saint-Bernard que j’ai évoqué plus haut faisait la quête. A la mort de cet homme, Brutus Longepierre acheta à ses héritiers, pour une bouchée de pain, l’orgue et le chien. Grand ami de la race canine, il recueillait les chiens abandonnés, qu’il soignait dans un chenil aménagé dans la courette de sa maison, épargnant aux quadrupèdes le triste sort de tomber aux mains d’individus sans scrupules qui les auraient capturés pour les livrer aux fabricants de gants,  ou de vestes en fourrure.

Il eut l’idée de tirer profit de ses hôtes. Il en choisit cinq, tous caniches, et en fit des artistes.

Le plus gros, de poil uniformément noir, fut nommé Hercule. Un autre, à la robe acajou, il était sans doute un peu bâtard, reçut le nom de Rufus. Une jeune personne, délicate, à la fourrure longue et d’un blanc immaculé, partageait avec la déesse de l’Amour le patronyme de Vénus. La plus âgée des deux chiennes, d’un embonpoint excessif, mais qui ne manquait pas de grâce, telle les femmes peintes par Rubens, répondait au nom d’Opulence. Enfin, un tout jeune caniche, tout blanc, à l’exception d’un cerne noir autour de l’œil gauche, avait été nommé Pirate par son maître.

Chaque matin, ce dernier enfermait ses élèves (et collaborateurs) dans une cage fixée sur la charrette tractée par le Saint-Bernard, nommé tout simplement Bernard. Arrivé sur l’un des marchés de Paris, Brutus montait une estrade, bornée par deux colonnes soutenant un fronton sur lequel était inscrite sa raison sociale : Au Chien galant. Le spectacle commençait par le défilé des caniches : Hercule ouvrait la marche, à quatre pattes, portant sur son dos Rufus, qui saluait avec la dignité d’un roi, suivi des deux dames (ou demoiselles) chiens, qui adoptaient la démarche des bipèdes, et enfin de Pirate, qui, lui, avançait en faisant des sauts audacieux, voire burlesques.

Les animaux s’asseyaient ensuite sur des fauteuils disposés sur l’un des côtés de l’estrade ; alors Brutus annonçait le programme du spectacle, et demandait à Bernard, au col duquel était attachée une sébile, de faire la quête.

Après avoir remercié les spectateurs, il appelait par son nom Hercule qui se plaçait au centre de la scène ; il le faisait sauter à travers un cerceau, soulever des poids énormes avec sa gueule, marcher à l’amble comme un cheval dressé, faire des ruades, enfin donner un concert de ses plus beaux et lus variés accords.

Venait ensuite le tour d’Opulence ; vêtue en marquise de l’Ancien Régime, elle tournait sur elle-même, avec lenteur et grâce, et, accompagnée par les sons mélodieux de l’orgue de Barbarie que jouait Brutus, exécutait à la perfection branles, menuets et courantes.

Rufus, quant à lui, l’intellectuel de la troupe, exécutait des opérations d’arithmétique sous la direction de son maître.

Enfin, au son d’une valse, danse nouvelle, Vénus et Pirate, vêtus à la mode du jour, et se tenant sur leurs pattes de derrière, dansaient à la grande joie du public.

Bernard repassait dans les rangs de ce dernier, puis Brutus Longepierre et son équipage gagnaient une autre place pour recommencer leur spectacle.

Jean-Louis Charvet.

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25 février 2013 1 25 /02 /février /2013 02:05

Dick, chien distributeur de journaux dans le quartier de l‘Etoile, à Paris.

Dans le journal Gil Blas du 29 février 1908, on pouvait lire l'article suivant:

 

"Le rôle du chien.

Nous connaissions le chien sauveteur, le chien de police, le chien cambrioleur, et même le chien tout court, qui ne sert à rien, se gratte les puces au soleil et aboie à la lune. Mais le chien distributeur de journaux? Voilà un auxiliaire agréablement inattendu de la presse. Dick est un caniche noir frisé, au museau de caoutchouc noir, à la queue en trompette. Il appartient à une papetière de la rue Lauriston, dans le quartier de l'Etoile.

Chaque matin, Dick s'en va, grave comme un sous-secrétaire d'Etat aux Beaux-Arts qui tiendrait dans sa serviette le sort de l'Ecole de Rome, et trottine de maison en maison, porteur d'un petit bât dans les paniers duquel sont les feuilles du jour. Dick fait sa distribution avec une impeccable sûreté. Il ne se trompe ni d'immeuble, ni de palier, ni d'étage, ni de porte. Il remet à la dévote sa feuille cléricale, au concierge sa gazette nationaliste, où pullulent les faits-divers (rubrique des "chiens écrasés"), à la midinette son journal à nouvelles et à feuilletons, à chacun de quoi se fournir d'opinions pour toute la journée.

On a parfois essayé de le distraire, de le tenter - susucre! - de le voler. Dick est gourmand, mais intègre. Il prend le sucre, remue la queue en signe de gratitude, et continue sa besogne."

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4 septembre 2010 6 04 /09 /septembre /2010 21:40

Ci-dessous lien vers une page internet consacrée à la marche anti-corridas, le 11 septembre prochain à Nîmes.

 

http://www.allianceanticorrida.fr/manif.html

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25 juin 2010 5 25 /06 /juin /2010 00:46

Sur une "tradition" méridionale: la tauromachie.

Les partisans de la tauromachie, la loi française elle-même font de la tradition "ininterrompue" un argument pour défendre et pérenniser un spectacle qui révolte de plus en plus de personnes.

C'est oublier que la tradition de la mise à mort n'est, dans le midi de la France, ni générale, ni ininterrompue.

A Avignon, étaient parfois organisés, au XVIII° siècle, des combats mettant en scène des taureaux; ainsi, en 1769, des hommes s affrontèrent, dans lenclos de Saint-Roch, à des « bœufs de Camargue » à la queue desquels étaient attachés des chats; ainsi, en 1771, dans la cour de lhôtel de Villeneuve (actuellement musée Calvet), des taureaux combattirent des dogues anglais; furent également exposés aux assauts de ces molosses un ours, un loup et un petit cheval prussien.

Les jeux taurins prirent leur essor au XIX° siècle; ils avaient lieu dans les quartiers de Bagatelle, de Champ-Fleury, du Blanchissage, dans les îles Piot et de la Barthelasse.

Se succédèrent périodes d interdiction, dautorisation, de tolérance. La course à la cocarde apparut sans doute vers 1830. Cest à la fin du XIX° siècle que les courses de taureaux prirent la forme qui est la leur aujourdhui.

En 1853, le ministre de l intérieur autorisa les courses au sud dune ligne reliant Bordeaux à Avignon.

La passion pour la tauromachie ne fit que croître; pour en montrer l importance, on notera que, par exemple, entre 1886 et 1890, une dizaine de corridas avaient lieu chaque année dans les arènes de Bagatelle.

Les mauvais traitements infligés aux taureaux ne laissèrent pas indifférente une partie de la population; ainsi, dans le numéro de septembre 1860 du Bulletin mensuel de la Société protectrice des animaux, trouve-t-on cette description, manifestement empreinte de réprobation, d une course donnée à la Barthelasse:

Dans un cirque en planches mal construit, pouvant contenir mille à douze cents personnes, sept ou huit cents spectateurs, peu de dames, mais des hommes, des jeunes gens, enfants de quatorze à quinze ans, applaudissaient lorsque je suis arrivé, une cinquantaine d individus armés de bâtons plus ou moins gros qui tapaient sur une pauvre petite génisse et un grand taureau vieux et efflanqué pour les faire courir; à chaque coup de bâton bien appliqué, la joie était générale venait la ferrade que tout le monde attendait et réclamait avec impatience On ma expliqué que lon plaçait un bouquet sur la tête du taureau et quune récompense était donnée à qui sen emparerait et le terrassait alors un homme monté sur un cheval et armé dune longue lance à deux pointes savançait près delle (la génisse) et la lui enfonçait dans le flanc trois ou quatre fois la même chose recommençait la bête faisait entendre des cris plaintifs

La Société protectrice des animaux ne fut pas seule à s'élever contre ces pratiques barbares; l'Église catholique le fit également. Dans un mandement adressé en 1865 aux fidèles de son diocèse, Monseigneur Plantier, évêque de Nîmes, écrivait notamment:

Qu'on ne dise pas que la foule se précipite aux Arènes pour contempler l'adresse, l'agilité, la force et le sang-froid des toréadors; les blessures ou les cris des taureaux ont plus de charme pour elle que toute l'habileté de leurs agresseurs. Si l'athlète surtout est meurtri, l'enthousiasme et le bonheur débordent. On frémit sans doute de voir souffrir; mais on s'enivre de cette torture. L'aspect d' une plaie entr'ouverte, la pourpre du sang qui coule exercent sur les yeux les plus irrésistibles des fascinations, et si vous examinez bien le moment où la foule tressaille avec le plus d'exaltation sur ces sièges séculaires, vous verriez que c'est ordinairement quand un coup plus sinistre que les autres vient d' épouvanter l' arène.

Et l évêque tenait ensuite les propos suivants, que l'on qualifierait peut-être aujourd'hui de misogynes:

Elles

(les femmes) savourent avec une sorte de volupté fébrile les émotions excitées en elles par les incidents plus ou moins sinistres dont elles sont les témoins, elles agitent les bras, elles poussent des cris aux instants solennels avec une fougue, des élans, et, si j'ose le dire, des convulsions qui révèlent quelles fumées le sang répandu fait monter à leur tête; et c'est bien à elles qu' il appartient de démontrer que les amphithéâtres excitent l'intérêt jusqu'à la fureur. Ces reproches sont sévères, mais il fallait bien venger l

humanité, la science et la religion outragées par ces scènes de carnage.

Monseigneur Plantier ne faisait que mettre en pratique les instructions que le pape Pie IX lui avait adressées en 1858:

... Ne cessez point de persuader au pouvoir civil que les jeux du cirque sont en complet désaccord avec les sentiments d'humanité bien connus de la nation française.

...

Le pape Pie V, dans son encyclique De salute gregis (1567), avait déjà condamné les courses de taureaux:

Considérant que ces spectacles où taureaux et bêtes sauvages sont poursuivis au cirque ou sur la place publique sont contraires à la piété et à la charité chrétienne, et désireux d’abolir ces sanglants et honteux spectacles dignes des démons et non des hommes (…) à tous et chacun des prince chrétiens, revêtus de n’importe quelle dignité, aussi bien ecclésiastique que profane (…) Nous défendons et interdisons, en vertu de la présente Constitution à jamais valable, sous peine d’excommunication encourue ipso facto, de permettre qu’aient lieu (…) des spectacles de ce genre où on donne la chasse à des taureaux et à d’autres bêtes sauvages.

Nous interdisons également aux soldats et autres personnes de se mesurer à pied ou à cheval,dans ce genre de spectacle, avec des taureaux et des bêtes sauvages. Si quelqu’un vient à y trouver la mort, que la sépulture ecclésiastique lui soit refusée. Nous interdisons également, sous peine d’excommunication, aux clercs aussi bien réguliers que séculiers (…) d’assister à ces spectacles (…) Nous ordonnons à tous les princes (…) d’observer strictement toutes les clauses prescrites ci-dessus (…) nous ordonnons à tous nos vénérables frères archevêques et évêques , de publier suffisamment en leurs diocèses respectifs la présente lettre et de faire observer lesdites prescriptions… »

Les instructions de l'Église visaient à protéger l'animal, mais surtout la dignité de l'homme, que, selon elle, l'assistance à de tels spectacles ne pouvait qu'avilir.

Il ne m'a pas semblé inutile de les rappeler.

En effet, il n'y a pas si longtemps, les 26 janvier 1986 et 25 janvier 1987, furent organisées à Avignon deux corridas portugaises; M. Thomas, président de la Société protectrice des animaux vauclusienne, a eu l'obligeance de m'adresser copie du jugement qui fut rendu à cette occasion par le tribunal correctionnel d'Avignon, le 2 mars 1989: le tribunal condamna M. X à 5000 francs d'amende pour complicité d'actes de cruauté envers un animal domestique ou assimilé, et à verser 8000 francs à la Société protectrice des animaux vauclusiennes, et un franc à chacune des associations suivantes: l' Oeuvre d'assistance aux bêtes d'abattoir, la Ligue française des droits de l'animal, la Société nationale pour la défense des animaux et l'Assistance aux animaux; M. X fit appel de ce jugement qui fut confirmé par la Cour d'appel de Nîmes par arrêt du 17 octobre 1999 (M. X s'était désisté de son appel).

Les juges avignonnais motivèrent leur jugement en établissant que d'une part la corrida portugaise constitue des actes de cruauté de par l'emploi des instruments utilisés, d'autre part qu'il n'existait pas à Avignon une tradition tauromachique ininterrompue.

Jean-Louis Charvet.

 

 

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19 mai 2010 3 19 /05 /mai /2010 00:25

Il me nomme Fido, je l'appelle Alfonso.

Avec lui, j'ai vu la Grèce, Smyrne,

Constantinople, Rhodes,

Beyrouth, Jérusalem.

Je partage ses peines, ses amours et ses rêves;

De ses sept lévriers, je suis le préféré.

Sur ma tombe, peut-être, il écrira ces mots:

La chaîne à mille anneaux va de l’homme â l’insecte :

Que ce soit le premier, le dernier, le milieu,

N’en insultez aucun, car tous tiennent à Dieu !

 

Vous trouvez surprenant que moi, un chien, je parle.

Et plus encore que je versifie, même si, et de loin, je n'égale pas mon maître.

Ne dites-vous pas, cependant, de votre compagnon à quatre pattes: il ne lui manque que la parole? Et ne considérez-vous pas que, comme vous, il aime, souffre, se réjouit, a même de l'humour?

Alfonso m'a appris à parler, mieux qu'aux stupides perroquets, qu'aux incultes mainates. Mais il ne le sait pas: il a été mon instituteur à son insu. Avec lui je communique comme les chiens sans éducation, en aboyant, grognant, jappant, gémissant. Parfois, je souffle, d'un air accablé; s'il vient de me lire un poème, il prend ceci pour une critique. Je ne le démens pas.

Il m'emmène chasser, pour mon plaisir, pas pour le sien: souvent il tire en l'air, par pitié pour l'oiseau, le lièvre qui tremble devant son fusil.

Les heures que je préfère sont celles que je passe avec lui quand, dès avant l'aube, il écrit. Souvent, il s'interrompt, me lit quelques vers, quelques lignes. Sur mon canapé, je dresse la tête vers lui, fais mine de m'intéresser à ce qu'il dit lorsqu'il compose ses longs ouvrages historiques, l'Histoire des Girondins, l'Histoire de la Turquie par exemple.

J'apprécie plus sa poésie. Mais mon plaisir suprême est de l'entendre parler de politique et de métaphysique.

J'aimerais l'imiter, composer un ouvrage sur les droits des animaux, dont il pourrait s'inspirer. Mais je ne sais pas écrire. Et puis, révéler que je pense, que je parle me fait peur. Ne risquerais-je pas, en sortant de ma condition et de mon silence, de me retrouver dans un cirque?

 

Je ne sais comment un chat que je connais (une simple relation, pas un ami) a réussi à faire paraître récemment, sous le nom d'Hippolyte Taine, son maître, un livre scandaleux intitulé: Vie et opinions philosophiques d'un chat. On peut y lire notamment ceci:

 

Le chien est un animal si difforme, d'un caractère si désordonné, que de tout temps il a été considéré comme un monstre, né et formé en dépit de toutes les lois. En effet, lorsque le repos est l'état naturel, comment expliquer qu'un animal soit toujours remuant, affairé, et cela sans but ni besoin, lors même qu'il est repu et n'a point peur? Lorsque la beauté consiste universellement dans la souplesse, la grâce et la prudence, comment admettre qu'un animal soit toujours brutal, hurlant, fou, se jetant au nez des gens, courant après les coups de pied et les rebuffades? Lorsque le favori, et le chef-d'oeuvre de la création, est le chat, comment comprendre qu'un animal le haïsse, coure sur lui sans en avoir reçu une seule égratignure, et lui casse les reins sans avoir de manger sa chair?

Ces contrariétés prouvent que les chiens sont des damnés; très certainement les âmes coupables et punies passent dans leurs corps. Elles y souffrent: c'est pourquoi ils se tracassent et s'agitent sans cesse. Elles ont perdu la raison: c'est pourquoi ils gâtent tout, se font battre, et sont enchaînés les trois quarts du jour. Elles haïssent le beau et le bien: c'est pourquoi ils tâchent de nous étrangler.

 

Vous n'imaginez pas, sans doute, que je vais prendre la peine de polémiquer avec cet individu. Il me serait facile, pourtant, de me gausser de cette race féline, qui n'a d'autre utilité sur terre que de manger quelques souris, quelques rats; et je pourrais ajouter, perfidement, qu'ils ne les mangent pas toujours, se contentant, si l'on peut dire, de jouer au chat et à la souris.

Combien la race canine est plus utile!!!

Chiens de traîneau, chiens d'aveugles, chiens secouristes, chiens de guerre même; nous gardons les troupeaux, les propriétés, on nous utilise même à tracter des véhicules.

 

Quant à moi, qui ne suis qu'un animal dit de compagnie, ma mémoire sera éternelle. Dans Jocelyn, en effet, mon maître a écrit ces lignes, un peu grandiloquentes à mon goût, que je ne cite que parce qu'elles dépassent, et de loin, mon humble personne:

Ô mon chien ! Dieu seul sait la distance entre nous ;
Seul il sait quel degré de l’échelle de l’être
Sépare ton instinct de l’âme de ton maître ;
Mais seul il sait aussi par quel secret rapport
Tu vis de son regard et tu meurs de sa mort,
Et par quelle pitié pour nos cœurs il te donne,
Pour aimer encor ceux que n’aime plus personne.
Aussi, pauvre animal, quoique à terre couché,
Jamais d’un sot dédain mon pied ne t’a touché ;
Jamais, d’un mot brutal contristant ta tendresse,
Mon cœur n’a repoussé ta touchante caresse.
Mais toujours, ah ! toujours en toi j’ai respecté
De ton maître et du mien l’ineffable bonté,
Comme on doit respecter sa moindre créature,
Frère à quelque degré qu’ait voulu la nature.
Ah ! mon pauvre Fido, quand, tes yeux sur les miens,
Le silence comprend nos muets entretiens ;
Quand, au bord de mon lit épiant si je veille,
Un seul souffle inégal de mon sein te réveille ;
Que, lisant ma tristesse en mes yeux obscurcis,
Dans les plis de mon front tu cherches mes soucis,
Et que, pour la distraire attirant ma pensée,
Tu mords plus tendrement ma main vers toi baissée ;
Que, comme un clair miroir, ma joie ou mon chagrin
Rend ton oeil fraternel inquiet ou serein,
Que l’âme en toi se lève avec tant d’évidence,
Et que l’amour encor passe l’intelligence ;
Non, tu n’es pas du cœur la vaine illusion,
Du sentiment humain une dérision,
Un corps organisé qu’anime une caresse,
Automate trompeur de vie et de tendresse !
Non ! quand ce sentiment s’éteindra dans tes yeux,
Il se ranimera dans je ne sais quels cieux.
De ce qui s’aima tant la tendre sympathie,
Homme ou plante, jamais ne meurt anéantie :
Dieu la brise un instant, mais pour la réunir ;
Son sein est assez grand pour nous tous contenir.
Oui, nous nous aimerons comme nous nous aimâmes.
Qu’importe à ses regards des instincts ou des âmes ?
Partout où l’amitié consacre un cœur aimant,
Partout où la nature allume un sentiment,
Dieu n’éteindra pas plus sa divine étincelle
Dans l’étoile des nuits dont la splendeur ruisselle
Que dans l’humble regard de ce tendre épagneul
Qui conduisait l’aveugle et meurt sur son cercueil ! ! !

Oh ! viens, dernier ami que mon pas réjouisse,
Ne crains pas que de toi devant Dieu je rougisse ;
Lèche mes yeux mouillés, mets ton cœur près du mien,
Et, seuls à nous aimer, aimons-nous, pauvre chien !

 

Les larmes me montent aux yeux. Je m'arrête: c'est l'aube. Vous entendez, comme moi, le sombre merle débiter ses trilles, de lui seul comprises, mais qui charment peut-être, à la fin de la nuit triste, une belle de son espèce, un Faust épuisé par les veilles.

Où avais-je la tête? J'ai oublié de vous dire le nom de mon maître: Alphonse de Lamartine, se disant poète.

 

Propos recueillis par Jean-Louis Charvet.

 

 

 

 

 

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