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8 juin 2011 3 08 /06 /juin /2011 11:44

Histoires de familles.

Un ami psychologue m'a demandé pourquoi je passe tant de temps à des recherches sur ma généalogie et mon histoire familiales. Je lui répondis, pour me dérober, qu'il le savait bien, en tant que psychologue et en tant qu'ami.

Mais je n'ai pas, n'aurai sans doute jamais la réponse à cette question.

Ce que je sais c'est que ma manie est fort commune. Jamais on ne s'est intéressé autant à la généalogie, autrefois distraction des puissants et des nobles. La pratique de cette science, car c'en est une, a été considérablement facilitée par le travail remarquable des associations généalogiques, grâce à leurs relevés et à leurs publications, et par l'informatique, qui permet souvent de mener des recherches approfondies sans être obligé de se rendre aux archives (même si la consultation des sources est parfois indispensable).

Ce que je sais aussi, c'est que la recherche de ses origines est pour l'homme une nécessité vitale; d’où viens-je, ce n’est pas seulement une question philosophique, mais aussi une interrogation intime, pressante, qui s’accompagne d’une autre: pourquoi suis-je venu au monde, et d’une autre: suis-je libre ou ne suis-je que le produit, impuissant, d’une hérédité?

L’un de nos grands écrivains, Émile Zola, a tenté de répondre à ces questions dans les Rougon-Macquart, dont le sous-titre est: Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le second Empire.

J’ai lu il y a peu Au Bonheur des Dames, avec intérêt et grand plaisir; comme dans ses autres romans, l’auteur y est à la fois un témoin précieux de son temps, décrivant l’ivresse des femmes dans ces temples de la consommation qu’étaient alors les luxueux grands magasins, remplacés depuis par nos froids hypermarchés, et un psychologue avisé, lorsqu’il décrit, par exemple, la passion d’Octave Mouret, homme d’affaires puissant, pour une humble employée , Denise Baudu.

Mon dealer en livres me conseilla de lire les Rougon-Macquart du début à la fin, ce que je viens d’entreprendre.

Mais, comme à mon habitude, j’ai fait une entorse à ce programme en feuilletant un peu les cinq volumes de la collection La Pléiade.

Et je fus frappé du fait que si le cycle commence dans un ancien cimetière, il finit dans la demeure d’un médecin, le docteur Pascal, obsédé par le problème de l’hérédité, accumulant notes sur notes à propos des observations faites dans l’exercice de son art, ou, tout simplement, en observant les membres de sa famille. Ce personnage, dont je viens à peine de faire la connaissance, m’est étrangement proche.

Je reviens aux questions posées plus haut, et en pose une autre: que m’importe de savoir que, parmi mes ancêtres, je compte Berthe aux grands pieds, Othon le sanguinaire de Germanie, Etiennette Douce de Marseille, Guillemette de Sabran, Phanette des Baux, Sancie de Simiane, Galburge de Mornas, mais aussi, sans doute, des personnes peu recommandables, et des milliers d’oubliés de l’Histoire? j’écris ce mot avec une majuscule, car on veut, peut-être à tort, la distinguer des histoires, modestes, celles de ces paysans, de ces artisans, de ces commerçants, qui, souvent n’ont laissé de traces que dans les registres d’état-civil, les minutiers des notaires, et les recensements.

Je laissera le soin de répondre au comte Alexandre de Tilly, page de la reine Marie-Antoinette:

L'Histoire! Cette compilation incertaine de notre fugitive apparition sur ce globe de sang et de boue! L'Histoire! que nous pouvons à peine écrire quand nous en sommes les contemporains; nous qui voulons citer les siècles dans nos pages mensongères; nous qui voulons deviner les mystères de la nature, et le dernier secret de Celui qui l'a créée!!! Et nous mettrions de l'importance à quelque chose, nous qui sommes nés d'hier, qui mourrons demain, nous qui foulons une terre qui périra comme nous? et qui écrivons quelques pages de notre histoire; tandis que toutes les pages de la vie sont déchirées, que le grand livre de l'univers sera lui-même effacé, et qu'il ne restera plus que l'immensité du néant!

Comment expliquer l'attrait qui nous pousse à laisser un souvenir sur des débris et parmi des ruines? L'homme a donc un penchant à disputer quelques dépouilles à la mort, à déposer quelques traces de lui-même, à propager des pensées qui furent contemporaines de son passage dans la vie? Il espère que ses écrits lui survivront de quelques jours: il aime à lutter avec le néant.

Cette lutte, je la crois salutaire, pour les individus comme pour les nations, comme pour les peuples. Et je trouve plus de courage et de noblesse chez le docteur Pascal, qui consigne tous les faits qu’il observe, que chez sa parente, Félicité Rougon, qui brûle tous les papiers du docteur, pour sauver ce qu’elle appelle « la gloire de notre famille ».

L’oeuvre, le grand œuvre, dirai-je, se termine par une lueur d’espoir: Clotilde, au chevet de son enfant, découvre, seul document échappé des flammes, l’Arbre généalogique de la famille, se souvient du cri de Pascal: « Ah! notre famille, que va-t-elle devenir, à quel être aboutira-t-elle enfin? », avant de contempler son enfant, avec la conviction qu’il serait très beau, très bon, très puissant, nourrie de « la croyance qui donne à l’humanité la force sans cesse renaissante de vivre encore.»

Jean-Louis Charvet.

 

 

 

 

 

 

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4 juin 2011 6 04 /06 /juin /2011 23:49

CELIBAT. On appelle ainsi une sorte de viduité par laquelle l'homme échappe à la loi naturelle de la reproduction. Cet état se conçoit chez ceux que la constitution des organes condamne à l'impuissance; mais, généralement, l'abstention du mariage est due à des causes purement volontaires. Le célibat n'est guère imposé que par la loi religieuse catholique. Cet état produit chez l'homme une atrophie morale qui est bien plus sensible encore chez la femme. Souvent l'hystérie se développe chez les femmes et les jette dans d'étranges désordres, et les cas d'épilepsie et de catalepsie sont assez nombreux. Les relations qui existent entre le système nerveux et les organes reproducteurs amènent une exaltation fiévreuse et délirante que la superstition a prise trop souvent pour l'état de perfection morale. Cette véritable folie amène l'extase, des visions extravagantes, qui a pu faire croire, dans les temps d'ignorance, que les pauvres créatures qui y étaient sujettes se trouvaient sous l'inspiration de Dieu ou sous celle du démon, suivant la nature de leurs actes. Les Hébreux croyaient que les rapports entre les sexes faisaient perdre aux ministres du sacerdoce le don de prophétie. Les convulsionnaires n'ont pas eu de plus fervents adeptes que certaines dévotes dont les sens étaient exaltés par le célibat. La science médicale a même posé la question de savoir si l'état convulsionnaire qui se manifeste parfois chez les jeunes filles, dans certaines localités, n'est pas une véritable maladie d'un caractère épidémique, à laquelle l'ignorance attribue un caractère tantôt religieux et tantôt démoniaque. Chez les hommes, le célibat modifie profondément les facultés morales et intellectuelles: l'égoïsme ets le principal caractère du célibataire; il devient insupportable aux autres et à lui-même; la solitude qui s'est faite dans son coeur le conduit bien souvent au suicide. On a remarqué que le célibat abrégeait considérablement la vie, et que les religieuses de l'un ou l'autre sexe (sic) qui ne manquaient pas à leurs voeux atteignent rarement un âge avancé. Quant au célibat qui consiste dans l'éloignement du mariage, et qui cherche à s'en consoler par des relations passagères, il appartient bien plus à la comédie qu'à la physiologie; l'histoire de ces mécomptes bien mérités n'est jamais parvenue à nous attendrir. Les lois romaines créaient pour les célibataires une incapacité civile: ils n'étaient admis ni à tester ni à rendre témoignage en justice. Il y avait une sorte de déshonneur à mourir sans laisser de postérité.

 

Dictionnaire populaire de Décembre-Alonnier (vers 1860).

 

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29 mai 2011 7 29 /05 /mai /2011 21:20

Intérieur d'un harem.

Une vierge turque a inspiré de l'amour à un amant inconnu, et tandis qu'elle se rend au bain, des mains invisibles jettent des bouquets d'hyacinthe sur sa route. Les servants des bains, qui font l'office de Mercure, lui parlent d'un certain effendi qui aspire à posséder son cœur, comme un rossignol soupire après la possession d'une rose. La rose ne sait pas écrire, et partant n'est point exposée à se commettre par des billets doux; mais l'intermédiaire se charge de répondre à l'effendi que son hommage n'est pas désagréable. Il s'adresse alors au père, et lui demande la main de sa fille. Ce dernier y consent et ordonne à sa fille d'aimer, d'honorer son mari et de lui obéir. Le jour du mariage est convenu; ils s'épousent par procureur devant le cadi, et les rayons qui s'échappent des regards de l'effendi se réfléchissent pour la première fois sur les traits de la fiancée dans la chambre nuptiale.

Toutes ses jeunes compagnes envient le changement qui vient de s'opérer dans sa condition; si elle est la seule femme de son époux, elle règne dans le harem sur une tribu d'esclaves; que si, au contraire, son mari a deux ou trois autres femmes, elle partage avec elles les plaisirs de son empire domestique. Chaque semaine son mari lui donne périodiquement une preuve de son affection conjugale: il entre dans le harem à midi et il y revient après le coucher du soleil, lorsque les promenades successives dans les divers bazars sont terminées. Il fait ses ablutions du soir; une de ses femmes parfume sa barbe avec une fiole d'essence de roses, tandis qu'un autre lui présente un miroir à manche de nacre, et qu'un troisième lui tend une serviette brodée. Les femmes se tiennent debout pendant les repas de leur maître ou de leur mari. Lorsqu'il a fini de manger, on apporte pour elles un certain nombre de mets additionnels. Leur savoir-vivre consiste à manger sans avidité les friandises qu'on leur présente, et pour lesquelles elles ont un goût passionné.

Quand le souper est fini, les domestiques disparaissent, et l'on se met à boire le rosolio; on voit des dames turques qui en prennent jusqu'à trois ou quatre petits verres dans l'espace de dix minutes. Le maître du harem reçoit d'ordinaire sa pipe des mains d'une jeune fille esclave qui la lui présente à genoux. Le matin, une de ses femmes lui donne son café en lui baisant respectueusement la main. A cette époque de la journée, il n'y a que celles qui ont l'honneur d'être mères qui osent s'asseoir devant lui; mais après le repas du soir, presque toute étiquette est bannie; car il n'est pas vrai, comme le prétend M. Poucqueville, que les Turcs ne perdent jamais de leur gravité, même dans l'intérieur de leur harem; ils se livrent, au contraire, à la plus grande licence, dans leurs orgies du soir; et leurs bruyants éclats de rire retentissent jusque dans les maisons voisines. Cette gravité même de l'Osmanli, pendant le cours de la journée, paraît être le résultat des excès de la veille. On en voit qui restent tout le jour couchés sur leur divan, en fumant leur longue chibouque tandis qu'une de leurs femmes ordinairement la préférée, chatouille légèrement, avec ses doigts la plante de leurs pieds. C'est la plus grande volupté du harem; et, un amateur d'opium qui se trouvait naguère à Paris, disait que dans ses rêveries les plus délicieuses, il se supposait toujours chatouillé par les houris aux yeux noirs du paradis.

 

L'empire ottoman illustré. Constantinople ancienne et moderne; comprenant aussi les sept églises de l'Asie mineure, illustrés d'après les dessins pris sur les lieux par Thomas Allom, esq., précédées d'un essai historique sur Constantinople et de la description des monumens de Constantinople et des sept églises de l'Asie mineure, par MM. Léon Galibert et C. Pellé, collaborateurs de la Revue britannique. Première série. Fisher, fils et Cie. A Paris, quai de l'Ecole; et à Londres.

Sans date (1838). Nombreuses illustrations.

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2 mai 2011 1 02 /05 /mai /2011 21:26

 

 

Avis de Soutenance.


Science Politique.

 

 

Pedro Heitor BARROS GERALDO soutiendra publiquement

ses travaux de thèse intitulés:

La proximité au Palais. Une analyse de la socialisation des juges de proximité.


Soutenance prévue le mercredi 11 mai 2011 à 14h00
au 39, rue de l'Université, 34000, Montpellier ( Salle des actes, Faculté de Droit, Bâtiment 1, RDC ).

 

 

 

 

Résumé :

Cette recherche analyse le processus de socialisation des juges de proximité au sein des Tribunaux d'Instance. Les Juridictions de Proximité ont été créées par la réforme de la Justice de 2002. Pour les réformateurs de la justice, cette juridiction incarne la volonté de déjuridiciser la relation entre la justice et les justiciables. La réaction du corps de la magistrature a stigmatisé la figure des « juges-citoyens » qui ont été soupçonnés de ne pas posséder les compétences pour rendre une justice de qualité. Ainsi, l'accès au poste est restreint à des juristes de formation. L'objectif de créer une justice de proximité est aujourd'hui loin d'être concrétisé. Son organisation a produit un phénomène paradoxal où les juges de proximité rendent une justice plus juridicisée que les juges professionnels. Cette thèse cherche à comprendre les conditions sociales de production de ce paradoxe. L'enquête de terrain consiste en des entretiens avec des juges de proximité, juges professionnels et greffiers ; un dense travail d'observation d'audiences judiciaires et un stage dans le tribunal d'Instance de Sète. L'organisation sociale de la justice de proximité est analysée à travers la socialisation des juges au sein des juridictions et l'accomplissement pratique de leur travail. L'intégration des juges de proximité est importante pour comprendre la stigmatisation dont ils sont l'objet et les stratégies employées pour surmonter les difficultés relationnelles. La construction de l'identité est le résultat d'un processus cognitif d'interprétation des attentes des membres des tribunaux par les juges de proximité. Ils surjouent leur rôle en valorisant leurs connaissances juridiques pour retourner le stigmate. A partir d'une analyse ethnométhodologique, les différentes méthodes utilisées par les juges de proximité et par les juges d'Instance sont comparées afin de comprendre comment le travail est accompli en coordination avec les greffiers. La comparaison est étendue au travail accompli avec les justiciables durant les audiences. Les techniques employées sont décrites afin de démontrer la manière dont les juges de proximité focalisent les interactions aux aspects juridiques, contrairement aux juges d'Instance. Comme conclusion, les juges de proximité rendent une justice plus juridicisée, parce qu'ils cherchent à montrer leurs connaissances juridiques pour se socialiser en reléguant au second plan les habiletés pratiques pour accomplir le travail quotidien. La sociologie de la décision judiciaire contribue à comprendre les conditions concrètes et les inquiétudes séculaires qui guident le processus décisionnel.

 

 

 

 

 

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29 avril 2011 5 29 /04 /avril /2011 13:39

Je ne suis pas bibliophile, de ceux qui achètent des premières éditions coûteuses, illustrées par de grands maîtres, mais bibliophage, goinfre, dirais-je vulgairement, de livres à l'apparence modeste, voire défraîchie, mais qui ont plus d'âme que leurs frères aristocratiques.

L'un de mes derniers achats porta sur quatre missels ou paroissiens, le plus ancien de 1905, le plus récent étant mon contemporain exact, puisque revêtu d'une mention de dépôt légal en 1951.

Le "Paroissien noté des diocèses de France", édité en 1929 à Marseille, a un aspect austère, une reliure en carton noir; il a l'avantage de contenir, en "notation moderne", tous les chants que des générations de fidèles entonnèrent à la messe et aux vêpres, du "Beatus vir" au "Libera me Domine" des funérailles, du "Panis Angelicus" au "Tantum ergo Sacramentum". Les illustrations, rares et sobres, sont inspirées des bois de la fin du Moyen Age, avec phylactères, branches fleuries et anges musiciens.

Le "Missel des saints évangiles" édité à Malines vers 1905, voit son texte encadré par cinq compositions, en alternance. Quatre d'entre elles sont des scènes de l'Ancien Testament, semblables à celles qui firent rêver de l'Orient le jeune Lamartine; ce sont: une fontaine aux environs de Jérusalem, la halte d'une caravane dans les montagnes de la Samarie, des cavaliers syriens passant le Jourdain à gué, un troupeau passant sur les bords du lac de Génésareth; la cinquième représente le Livre de vie et les emblèmes des Évangélistes. Je connaissais ces symboles, mais non leur signification; la voici: "Saint Mathieu a pour emblème l'Homme, parce qu'il insiste surtout dans son livre sur l'humanité du Christ. Saint Marc a pour emblème le Lion parce que, suivant Saint Jérôme, son Evangile nous témoigne surtout de la résurrection. D'après une tradition orientale, les lionceaux, à leur naissance, gisent inanimés pendant trois jours, puis sont réveillés par le rugissement de leur mère. Saint Luc a pour emblème le Boeuf, parce qu'il traite surtout du sacerdoce et de l'esprit de sacrifice du Christ. Saint Jean a pour emblème l'Aigle, parce que s'élevant plus haut que les autres Évangélistes, il traite surtout dans son livre de la divinité du Christ".

Le "Missel romain" publié en 1915 à Turnhout (Belgique), présente aussi une alternance d'encadrements, qui représentent des scènes plus modernes; celle que je préfère est Saint Michel transperçant le Démon, devant le Mont Saint Michel. Tous les encadrements comportent les lys de France, sur fond d'azur.

Enfin, le plus récent de ces missels , le "Missel vespéral" publié à Limoges en 1951, n'est que peu illustré: quelques vignettes en noir et blanc, et, en bistre, des reproductions de tableaux de maîtres, dont une superbe Annonciation de Fra Angelico.

Trois de ces missels contiennent des images pieuses, pour la plupart des images que l'on offrait aux premiers communiants qui, à leur tour, les offraient à leurs parrain et marraine, parents, amis. Certaines ont un grand charme, notamment celles qui représentent le communiant devant l'autel, assisté de son ange gardien (je ne sais pas si l'on croit encore à ces utiles et charmantes créatures). D'autres représentent des saints, ou des miracles, comme celui du Saint Cierge: en 1105 la Vierge aurait remis aux fidèles d'Arras, qui souffraient d'une épidémie du mal des ardents, un cierge, en leur recommandant d'en faire couler les gouttes dans de l'eau et de donner cette eau aux malades, afin qu'ils la boivent ou qu'ils en lavent leurs plaies. Une prière, figurant au dos de cette image, rapportait à celui ou celle qui la prononçait 50 jours d'indulgence (je crois que cette comptabilité n'est plus de mise aujourd'hui). D'autres enfin, plus récentes, témoignent de préoccupations plus sociales, telle celle, ornée d'un dessin dans la manière de Jean Cocteau, appelant à participer à la Journée nationale pour la paix, organisée le 22 mai 1955 par le mouvement Pax Christi, avec comme intentions de prières l'aide aux populations éprouvées par la famine en Tunisie, aux populations sous-alimentées des Indes, aux réfugiés du Viêt-Nam.

Bondieuseries, direz-vous?

N'est-il pas juste de s'y intéresser autant qu'aux objets de piété de ceux que l'on appelait autrefois les païens ou les infidèles? Et on y trouve, à côté d'un petit rameau de buis desséché, dans le parfum de ces vestiges surannés, le souvenir de nos aïeux qui, j'en suis persuadé, n'étaient pas plus sots que nous.

Jean-Louis Charvet.

 

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9 avril 2011 6 09 /04 /avril /2011 03:16

Loi sur l'alcoolisme en Angleterre. L'alcoolisme va sans cesse en augmentant en France. D'après M. le Dr Magnan, les entrées dans les Asiles étaient en 1872 de 18 pour 100. En 1900 et 1902, elles ont atteint 49 pour 100. Le fléau prend sans cesse de l'extension. Et les mesures que l'on adopte pour le combattre sont insignifiantes. Il en est autrement en Angleterre. Là on ne manque pas d'énergie. Depuis le 1° janvier 1903, on applique une nouvelle loi qui semble se révéler comme une arme puissante contre l'alcoolisme. Jusqu'ici l'ivresse n'était un délit que si l'ivrogne causait du scandale. On ne pouvait le condamner s'il se contentait de tituber, même de zigzaguer. Le cabaretier qui lui avait versé la dernière rasade n'était pas inquiété. Désormais, quels que soient les signes de son état, l'ivrogne peut et doit être arrêté. Homme ou femme risque, pour le fait de simple ivresse, un mois de prison. A la troisième condamnation, il passe sur la liste des "ivrognes chroniques" et sa photographie est fournie à tous les cabaretiers de son quartier. Dès lors, il est passible d'une amende, puis de la prison, s'il tente de se procurer de l'alcool n'importe où. Les cabaretiers de son quartier sont passibles d'une forte amende, s'ils lui en vendent: 250 francs la première fois, 500 la seconde, puis la prison jusqu'à six mois. Contre toute personne inscrite sur la liste des "ivrognes chroniques", la séparation judiciaire au profit du conjoint peut être immédiatement prononcée. Mais la loi n'a pas prévu le cas (trop fréquent) des époux inscrits sur la fatale liste. D'où mainte difficulté dans son application qui, pourtant, ne date que du 1° janvier dernier. En tout cas, c'est bien la guerre efficace contre l'alcool!

Source: journal La Nature, Paris, 28 mars 1903.

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6 avril 2011 3 06 /04 /avril /2011 16:31

François Pétrarque et Laure X, par Jean-Louis Charvet.

 

A l'entrée du jardin Sainte Claire, une plaque commémore la rencontre de François Pétrarque et de celle qui lui inspira de magnifiques vers, Laure. Voici ce qu'écrivit le poète sur cet amour:

"Laure, illustre par ses propres vertus et longuement célébrée dans mes vers, apparut à mes yeux pour la première fois, au temps de ma première adolescence, l'année du Seigneur 1327, le 6 du mois d'avril, dans l'église Sainte-Claire d'Avignon, au matin. Et dans cette même ville, au même mois d'avril, le même sixième jour, à la même heure matinale, mais l'année du Seigneur 1348, elle fut ravie à la lumière, alors que j'étais à Vérone, ignorant, hélas! de mon malheur. Cette triste nouvelle me fut apprise par les lettres de Louis à Parme, au mois de mai de la même année, le 19 au matin. Ce corps très chaste et très beau fut déposé dans le lieu de sépulture des frères mineurs, le jour de sa mort, dans la soirée. Je suis persuadé que cette âme, comme dit Sénèque l'Africain, est retournée au ciel d'où elle venait. C'est avec une certaine douceur amère qu'il m'a paru bon de relater le souvenir de ce triste événement à cet endroit qui revient souvent sous mes yeux, afin que je me souvienne qu'il ne doit y avoir rien qui me plaise davantage, dans cette vie, et que, ce grand lien étant brisé, je sache bien qu'il est temps de fuir Babylone, en voyant souvent ces paroles et en songeant combien vite fuit la vie. Grâce à Dieu, ce sera facile à qui songe fortement et en homme, aux soucis inutiles du passé, aux espérances vaines et aux dénouements inattendus."

Qui était cette Laure? Des générations d'érudits ont cherché à résoudre ce mystère. Pour l'abbé de Sade, parent du "divin marquis", il s'agissait de Laure de Noves, épouse d'Hugues de Sade, mère de onze enfants, d'où une très nombreuse descendance (dont mes nièces et mon neveu). Mais pour d'autres, non seulement il n'est pas prouvé que la Laure aimée de Pétrarque était Laure de Noves, mais il est constant que cela est impossible. Lire notamment "Laure de Pétrarque" de Fernand Brisset (librairie académique Perrin, 1931).

Quoi qu'il en soit, l'amour que voua Pétrarque à cette femme sans doute à jamais anonyme peut encore nous toucher; il s'agit d'un amour constant, qui dura au moins vingt ans, même s'il n'empêcha pas le poète de se marier, avant 1337, année de la naissance de son fils Jean.

Il avait pour objet une toute jeune fille, parée d'un vêtement de pourpre, bordé d'azur et parsemé de roses; "sa chevelure, écrit Pétrarque, tombait en cascade sur ses épaules et dans son dos, ses cheveux d'or flottaient au souffle de la brise".

Je crois voir l'une de ces belles que, quelques décennies plus tard, peignit Botticelli.

Ces amours inspirèrent de nombreux poètes, Victor Hugo notamment, qui, dans les vers que je reproduis ci-dessous, en rendirent le caractère à la fois tragique et merveilleux:

 

 

Pétrarque.

 

 

Elle n'est plus ici ; cependant je la vois

La nuit au fond des cieux, le jour au fond des bois !

Qu'est-ce que l'œil de chair auprès de l'œil de l'âme ?

On est triste ; on n'a pas près de soi cette femme,

On est dans l'ombre ; eh bien, cette ombre aide à la voir,

Car l'étoile apparaît surtout dans le ciel noir.

Je vois ma mère morte, et je te vois absente,

Ô Laure ! Où donc es-tu ? là-bas, éblouissante.

Je t'aime, je te vois. Sois là, ne sois pas là,

Je te vois. Tout n'est rien, si tout n'est pas cela,

Aimer. Aimer suffit ; pas d'autre stratagème

Pour être égal aux dieux que ce mot charmant : J'aime.

L'amour nous fait des dons au-dessus de nos sens

, Laure, et le plus divin, c'est de nous voir absents ;

C'est de t'avoir, après que tu t'es exilée ;

C'est de revoir partout ta lumière envolée !

Je demande : Es-tu là, doux être évanoui ?

La prunelle dit : Non, mais l'âme répond : Oui.

 

Extrait de la Légende des siècles.

 

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6 avril 2011 3 06 /04 /avril /2011 14:25

 

Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le sort a voulu t'appeler,
Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler.

 

 

Alfred de Vigny. La mort du loup (extrait).

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3 avril 2011 7 03 /04 /avril /2011 05:35

"Les généalogistes, toujours en quête d'origines extraordinaires pour les personnages dont ils cherchent à établir la filiation, ont tenté de rattacher les Médicis, sinon à un dieu, du moins à un demi-dieu! Dédaignant de les faire descendre simplement du premier homme, ils ont prétendu retrouver dans les boules qui figurent aux armes de cette famille, les fruits d'or cueillis par Persée dans le jardin des Hespérides; d'autres, de prétentions modestes, se sont contentés de leur reconnaître pour ancêtre le plus lointain, un médecin fameux qui, ayant guéri Charlemagne d'une grave maladie, aurait obtenu de l'empereur "à la barbe fleurie" de prendre pour armoiries les ventouses qui lui avaient été appliquées pour le guérir.

Il s'est trouvé des historiographes pour restituer à un Pierre Mège, gentilhomme toulonnais, qui, en l'an 1200, avec l'aide d'un seigneur de Marseille, arma quatre galères et quatre vaisseaux ronds pour donner la chasse à des pirates génois, l'honneur d'avoir été le premier ascendant des Médicis. Comme en provençal mège signifiait médecin, et se dit aussi medici, on s'explique la transformation ultérieure du nom, et comment un de nos confrères aurait pu être la souche originaire de cet arbre aux multiples branches".

 

Docteur Cabanès. Dans les coulisses de l'histoire. Deuxième série. Editions Albin Michel. Paris. 1937.

 

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1 avril 2011 5 01 /04 /avril /2011 19:42

LA PREMIERE ENTREVUE DE LAURE ET DE PETRARQUE.

 

A Monsieur Félix RAPARE.

 

 

Les cierges rayonnaient; l'orgue majestueux

Berçait de ses accords la nef de Sainte-Claire;

Tout un peuple à genoux se prostrait; l'aube claire

Allumait les couleurs des vitraux somptueux.

 

 

Laure priait; son corps souple et voluptueux

S'abandonnait, froissé par le siège angulaire;

Baignant ses noirs cheveux, une flamme solaire

L'auréolait d'un nimbe ardent et fastueux.

 

 

Et dans sa robe verte aux fraîches violettes,

Belle à désespérer les plus riches palettes,

On eût dit une reine au milieu de sa cour.

 

 

Mais la messe a pris fin; la dame se relève,

Et Pétrarque ébloui, comme percé d'un glaive,

Sent courir le frisson d'un immortel amour.

 

 

Ernest Feuillet.

Les cent sonnets. Avignon pittoresque.

F. Seguin, imprimeur-éditeur. Avignon. 1913.

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